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Présentation

  • : L'Amandier
  • : L'Amandier est une association dont l'objectif est de maintenir vivante l'oeuvre de Georges Brassens et de lui donner la place qu'elle mérite dans notre patrimoine culturel collectif.
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Chanson publiée dans le 25cm N°7 (album 6), enregistrée en février 1960.

Pierre Nicolas est présent, ainsi que Victor Apicella à la  2éme guitare.

 

Pour introduire le sujet, une archive sonore.

Entretien avec Philippe Nemo, France Culture, 1978.

C'est avec Le mécréant que Brassens aborde pour la première fois le thème de la foi.

 

Comme si le titre ne suffisait pas, le sujet est clairement exposé dès le premier des 21 distiques :

Est-il en notre temps rien de plus odieux

De plus désespérant que de n'pas croire en Dieu ?

Immédiatement suivi du souhait :

J'voudrais avoir la foi d'mon charbonnier...

 

Qu'est-ce à dire ?

L'origine de l'expression "la foi du charbonnier" se trouverait, d'après un grammairien du XVII° siècle, dans un conte qui dit ceci :

« Le Diable un jour demanda à un malheureux charbonnier :

- Que crois-tu ?

Le pauvre homme répondit :

- Toujours je crois ce que l'Église croit.

Le diable insista :

- Mais à quoi l'Église croit-elle ?

L'homme répondit :

- Elle croit ce que je crois.

Le Diable eut beau insister, il n'en tira guère plus et se retira confus devant l'entêtement du charbonnier ».

 

Si même le Diable s'est trouvé pris devant une telle argumentation, il n'y a rien à ajouter ! 


Apparaît ensuite le voisin du dessus, un certain Blaise Pascal.

Que vient faire ici ce célèbre personnage ? Pascal (1623-1662), inventeur précoce d'une machine à calculer (qu'il nomma Pascaline), grand physicien (théorie de la pression atmosphèrique, par exemple), auteur de nombreux travaux mathématiques de première importance, s'est aussi beaucoup consacré à la réflexion philosophique et religieuse. Et c'est là qu'intervient le conseil amical. Pascal défend l'idée que ce n'est pas l'homme qui peut acquérir la foi, mais que c'est Dieu qui la lui donne. L'homme a seulement le pouvoir de demander cette grâce par une prière que Dieu exauce toujours. Autrement dit, il faut s'adresser à un "personnage" en lequel on ne croit pas (car on ne peut pas) pour obtenir de sa bonté qu'il nous permette de croire en lui.

Ce que Brassens traduit de façon beaucoup plus claire par : Faites semblant de croire et bientôt vous croirez.

Pascal, grand mathématicien donc, traversa une période de vie mondaine au cours de laquelle il fréquenta les salons et c'est en réponse à des interrogations de joueurs qu'il jeta les bases du calcul des probabilités. C'est dans le célèbre Pari de Pascal qu'il associe cette théorie à ses convictions religieuses.

  Si je parie en l'existence de Dieu et que Dieu existe, je gagne la félicité éternelle tout en n'engageant qu'une existence finie. Si je parie en l'existence de Dieu et que Dieu n'existe pas, je n'ai perdu qu'une vie finie. Au total j'ai donc la possibilité de gagner une félicité infinie et ne risque de perdre qu'une réalité misérable. Inversement si je parie que Dieu n'existe pas et qu'il existe, je perds la félicité éternelle, c'est-à-dire mon salut. Si enfin je parie que Dieu n'existe pas et qu'effectivement il n'existe pas, je n'ai gagné qu'une réalité finie. Au total je risque donc de perdre beaucoup en cherchant à gagner bien peu.

Passons sur le fait, hors de propos ici, que le raisonnement mathématique est assez discutable (il a d'ailleurs donné lieu à une foule d'analyses contadictoires). Retenons seulement ce que cette autre forme du "conseil amical " inspira à Jacques Prévert (Paroles, 1946)

Les-paris-stupides.jpg

Plus loin se présente un autre personnage, contemporain celui-là. Un autre ! Les punaises de sacristie le prennent pour un autre... Même s'il n'est pas nommé (pas encore), les bigottes sont (presque) excusables d'avoir cru reconnaître le père Duval, qui était surnommé "le Brassens en soutane".

Aimé Duval, ordonné prètre en 1949, agrémentait ses sermons de chansons. Avec un succès tel que, dès 1953, il se consacre totalement à la chanson, s'accompagnant à la guitare. Une quarantaine de titres, une quinzaine de disques, plus de 3000 concerts dans une quarantaine de pays. Les chiffres sont éloquents.

Les deux hommes se sont rencontrés, devant les caméras de la télévision, interrogés par Robert Beauvais.

 

 

Plus tard, le père Duval reviendra, dans Les trompettes de la renommée. La vidéo confirme que ce catéchumène laisse bien dire "merde" à cet énergumène de Brassens. Mais la "bonne entente" n'est là que pour la chanson (ou pour la rime). En privé, Brassens confessait (il en parlait à son ami d'enfance l'abbé Barres) ne pas trop apprécier les chansons de la calotte chantante :

"Qu'est-ce qu'il a besoin de faire des chansons ?

Est-ce que, moi, je me mêle d'aller dire la messe ?".

 

Il est un autre ecclésiastique-chanteur qu'il convient de mentionner ici. Brassens ne l'a pas cité, mais Noël Colombier lui a consacré une chanson : Merci Brassens (Et Merci à Joseph Moalic pour l'enregistrement).

Noel-Colombier.jpg

Ce disque date de 1968. Le titre suivant "Jette la pierre" traite avec gravité d'un sujet malheureusement encore actuel.

Voici les deux premières strophes :

  Il est trois heures à Jérusalem

Sur la place, on vient de traîner

Une femme au visage blême

On dit qu'elle sera lapidée

Autour d'elle comme des chiens

Voyez hurler tous les gens biens

Mais qui donc jettera la pierre

Le premier sur la femme adultère

 

Pourquoi pas toi Jacob son voisin de palier

Toi qui fut le complice de sa volupté

Parce que tu es un homme,tu n'es pas concerné

La femme, dit la loi, doit être lapidée

Et toi tu passeras sans baisser les paupières

Tant ses larmes et son sang colleront la poussière

Allez, jette la pierre

Sur la femme adultère

 

Brassens, plus tard, utilisera, en guise de refrain, presque les mêmes mots...

Pour employer une expression qu'il utilisait lui-même à propos des paroles de La Marseillaise, on peut se demander si l'emploi de cette image dans une chanson destinée à faire rire n'est pas quelque peu "discutable sur le plan du bon goût".

Alors Georges, mécréant ou pas ? Certes, "Je me conduis guère plus mal que si j'avais la foi" répond à la question. Du moins on pourrait le penser. Mais chaque fois qu'il a laissé planer un doute, une simple interrogation personnelle sur le sujet, les tentatives de "récupération" n'ont pas manqué. Un livre a même porté le titre de "Brassens, le mécréant de Dieu". L'impartialité la plus élémentaire aurait nécessité un point d'interrogation.

Et Chanson pour l'Auvergnat, et La prière ? En voilà des chansons "chrétiennes" ! (combien de fois a-t-on lu ou entendu cet argument ?).

Sans parler de La messe au pendu, où l'hommage à l'homme d'église qui n'est pas un dégueulasse a masqué le réquisitoire contre une peine de mort qui existait encore.

 

A force de répéter sous diverses formes A toi seul de trancher s'il vaut mieux dire "amen" ou "merde à Dieu", il a permis à des brèches de s'ouvrir. Laissons lui la conclusion.

GB-pour-MPF.jpg

 

Entretien avec Max-Pol Fouchet - RTL, 13 octobre 1969

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